Sauvegardes émotionnelles.

 J’étais en train d’écouter de la musique aléatoirement, quand d’un coup, je suis tombée sur un medley de Kingdom Hearts, ça m’a fait remonter un souvenir : c’était avant le bac, celui de la semaine qui était censée être une semaine de révision. Je l’ai passée à jouer à Kingdom Hearts.

Et là, je me suis demandé : quelles œuvres, qu’elles soient littéraires, vidéoludiques ou musicales, m’ont trouvée à certains moments de ma vie ?
Celles qui, justement, sont devenues marquantes parce qu’elles m’ont rencontrée au bon endroit, au bon moment.

Et j’ai repensé à ce fameux passage de Proust, celui de la madeleine.
Il y raconte comment une simple bouchée ravive, sans prévenir, des souvenirs d’enfance entiers.
Me concernant, je n’ai pas vraiment de plat ou de parfum qui déclenche ça. Mais mes madeleines, elles, utilisent d’autres sens que le goût ou l’odorat. Oui, pour moi, ce sont des sons et des images. L’ouïe. La vue.

Et je me rappelle que Card Captor Sakura a été le premier anime que j’ai regardé. Je me revois encore, devant cette télé cathodique au milieu du salon, chaque mercredi matin à suivre assidûment les épisodes en VFL.
Je me vois encore avec cette fougue que j’avais, et je voulais lui ressembler : sa joie de vivre, son courage, sa résilience, l’aventure qu’était sa vie, le premier amour qu’elle avait, et sa meilleure amie. Tout, en Sakura, faisait vibrer la petite fille que j’étais.

Je me rappelle également cet été où j’étais partie en vacances. J’étais à la fin du primaire. Je me souviens qu’avec mon argent de poche, je me suis acheté mon premier manga : Yu-Gi-Oh !.
Ça n’avait rien à voir avec le côté girly de Sakura, mais quand je le lisais sur la plage ou à la maison de vacances que mon père louait, j’étais contente d’être dans ma bulle, entre deux pêches aux crabes de ma mère.

Ou encore… Linkin Park – In the End, que j’écoutais à ces moments où je n’étais pas triste, mais pas bien non plus. Ces moments où les émotions remontaient doucement, faute de pouvoir être exprimées autrement. Des frustrations sans mots.

Ce ne sont là que quelques souvenirs qui ont forgé mon passé.
Ils ne sont pas seulement marquants, ils ont également forgé ma personnalité et sont les témoins de mon évolution.

Je crois que ce ne sont pas juste des distractions.
Ces madeleines faites de pixels et de sons, de papier et d’encre, m’ont accompagnée dans des moments silencieux où je ne me sentais pas comprise. Elles m’ont ouvert un monde intérieur où me réfugier, mais aussi un miroir où commencer à me reconnaître.
Ce ne sont pas que des produits ou des morceaux de culture pop. Non, ce sont également des sanctuaires sensoriels qui m’ont permis de m’ancrer dans cette réalité.
Forcément, je ne peux pas tout garder… alors il y en a que je conserve précieusement, comme une boîte où l’on range des lettres.

Gao Xingjian disait :
« Il vaut mieux garder ses souvenirs d’enfance en soi, plutôt que de tenter de les vérifier. »

Ce sont ces repères émotionnels qui nous aident à définir ce que nous sommes, car ces archétypes dépeints nous appellent au plus profond.
C’est ainsi qu’une œuvre peut nous parler – ou parfois nous rebuter. Et je trouve ça magique.
Dans l’immensité de ce monde, il y aura toujours des œuvres qui nous trouveront, parce qu’elles nous parlent avant même qu’on les comprenne. Et on ne sait jamais pourquoi… à moins de se connaître vraiment profondément.

Et au-delà de ça, ces œuvres ont aussi rassemblé des personnes qui n’auraient jamais dû se rencontrer autrement.
C’est ça aussi, la magie : quand une œuvre devient un point de rencontre entre des personnes d’horizons différents.
C’est fou comme quelque chose d’aussi personnel peut devenir aussi universel.

Et, à l’adulte que je suis aujourd’hui, en l’honneur de l’enfant que j’étais, je repense à Sakura, car elle a véhiculé les valeurs qui me correspondent. Elle n’était pas juste une héroïne que j’admirais.
Elle a été un mentor invisible, un carburant discret, présent dans les étapes importantes de ma vie.
Elle me rappelle que la douceur n’est pas une faiblesse. Et que l’enfance… n’était pas qu’un passage. C’était une fondation.

Donc si un jour on devait me demander :
« Qu’est-ce que tu changerais dans ton passé si tu avais la possibilité de changer quelque chose ? »
À cette question, je répondrais avec fermeté et douceur :
« Rien, parce que sinon, je ne serais pas ce que je suis aujourd’hui. »

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